Trail BOURBON 2017

Île de La Réunion, le 20 octobre 2017

RUN 11Parcours Bourbon 2017

 

Par Jean-Philippe AUDEBERT, Bussy Saint-Georges Athlétisme (BSGA)

 

Dimanche 15 octobre 2017, aéroport d'Orly, jour du départ...

Pourquoi retourner sur  l'île de La Réunion pour le Trail Bourbon, qui m'avait fait tant souffrir aux cuisses en 2014... ? L'envie d'une revanche : le terminer dans un meilleur état !

Quelques signes du destin aussi : mes beaux-parents y vivent depuis un an, cela fait un bon pied à terre pour des séjours d'entraînement. Je n'oublie pas non plus le programme de courses des coachs du BSGA : le Mont-Ventoux en mars, le Trail de Gérardmer en juin, le challenge nature 77...c'est l'idéal !

Pas besoin de tirage au sort pour cette course parmi les 3 organisées. En effet 1600 demandes de dossard pour 1900 places. Je n'ai plus le choix, c'est parti pour une longue saison de Trail, ma deuxième après celle de 2014.

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A l'arrivée à Saint-Denis, on est accueilli par l'équipe organisatrice du raid : groupe de musique, danse, brunch, et un petit mot d'encouragement du directeur de course !

Le ton est donné. On repense alors à toute la préparation pour en arriver là : de longues séances d'entraînement toute l'année dans des escaliers, les Vallières, le Lavoir, les 25 bosses, la recherche d'un maximum de dénivelé.

Marc et Eric, nos brillants coachs de la piste m'avaient conseillé quelques séances de travail en excentrique, qui font mal, mais Ô combien utiles pour les descentes !

Enchainement de courses de plus en plus longues depuis mars, avec la 6000D en juillet pour encaisser une très longue montée suivie d'une très longue descente. Puis en septembre trois Trails en trois semaines (19, 44 puis 40 km) pour fatiguer l'organisme et l'habituer à puiser dans les réserves.

 

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J-2, c'est le moment d'aller chercher son dossard

Le principe n'a pas changé : on fait la queue pendant une heure, en plein soleil, et on recherche le peu d'ombre disponible pour ne pas gaspiller d'énergie.

Il me reste alors 48h pour continuer à me reposer, à manger un maximum, et à bien préparer mes affaires pour ne rien oublier. Le départ du Grand Raid est donné la veille de ma course. Trois amis du Bussy Running seront au départ, comme plusieurs collègues du travail, et je ne peux m'empêcher de regarder internet dans la nuit pour faire un point sur leur évolution. ERREUR ! Il était environ 4h, et je n'ai pas pu me rendormir...

Allez on se ressaisit et je me concentre sur mon objectif, je profite des dernières heures pour vérifier tout mon attirail.

Il faut dire qu'avec ma valise de 26 kg à l'aéroport, j'avais du tri à faire dans mon paquetage...et oui j'ai dû extraire 3 kg vers mon bagage cabine pour éviter la taxe de surcharge...une première pour moi ! C'est sur que j'avais bien tout prévu, le ravitaillement, les deux paires de Hoka, les tenues en double, quelques souvenirs pour mes amis réunionnais, etc...

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Arrivé à Cilaos, j'avale une dernière salade de pates, deux bananes, et il est temps d'aller me rendre sur le stade pour la vérification du matériel et attendre patiemment l'heure du départ. Un dernier bisou à mes beaux-parents qui m'ont gentiment accompagné, et me voilà allongé, les yeux fermés, à deux heures du départ de ce bel objectif.

20h30, la pression monte, les trailers se placent derrière une grille qui donne accès vers le départ. On apprend alors que c'est depuis une autre grille que l'on sortira du stade ! Moi qui étais derrière je me retrouve alors devant... A l'ouverture de ladite grille, une bousculade s'est créée car les favoris se retrouvaient piégés derrière... On se calme, la course est longue ! J'atteins enfin la banderole de départ sans pépin. Le décompte est alors lancé : musique créole, clapping, Ola, applaudissements envers les bénévoles, embrassades envers ses voisins pour se souhaiter le meilleur....

Quelle émotion durant ces dernières minutes avant la délivrance !

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21h, c'est parti pour le show !

Feu d'artifice sur ma droite, quel bonheur ! Des coureurs trébuchent déjà parce qu'ils lèvent les yeux vers le ciel, moi je regarde du coin de l'œil, ce serait bête d'abandonner là !

Il fait nuit noire, c'est jour de nouvelle lune hélas. Je progresse tranquillement jusqu'au premier point d'eau, après 45' et déjà quelques « bosses » et descentes. J'en profite pour remplir une gourde, je vais en avoir bien besoin, car c'est à ce moment qu'on attaque le premier « mur » : 1100m de D+ sur 4,5 km. Je connais bien ce passage, j'y vais à la sensation, et je me fais doubler par un nombre impressionnant de coureurs. Là-haut je me couvre, avant d'arriver au second ravitaillement. Nous sommes très nombreux ici, ça se bouscule pour avaler une bonne soupe, après 2h45 d'effort. Puis je repars sans tarder vers une descente effrayante : des pierriers, des échelles, des escaliers, le tout sur 1600m de D-, et 12,5 km.

Une petite brume est présente à cette altitude, et je suis surpris par ce rideau devant ma frontale : le terrain est difficile, mais en plus on n'y voit pas bien. Heureusement c'est assez sec ! Ma lampe frontale me lâche 2 mn avant mon arrivée au ravitaillement...ouf ! Je parviens à Hell Bourg en mettant 45' de plus qu'en 2014, une partie que j'avais courue de jour. J'ai perdu encore beaucoup de places, mais je suis habitué maintenant, je n'y prête plus attention ! Je reprends une soupe, un sandwich, une pomme de terre, et je repars très serein, il est presque 3h du matin. Me voilà face au second « mur » : 1300m de D+ en 14km.

Je continue à m'alimenter et à boire très régulièrement. Cette partie est assez monotone, on n'y voit rien, il est tard, les écarts se creusent. Je repense à cette descente, je suis fier de ne pas être tombé, et où j'ai dû doubler 10 personnes...mais que des blessés en fait ! Je pense à Delphine et aux enfants, qui sont dans l'avion et qui me rejoindront dans la journée, je pense au club, aux sorties de préparation entre passionnés comme moi. Aux sacrifices tout au long de l'année...Il faut meubler dans ces moments, pour faire passer le temps ! J'entends de petits chants d'oiseau vers 5h, enfin la plaine des Merles, le point culminant ? Hélas non, c'est juste le lever du jour...

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Quelques minutes après le lever du soleil, j'atteins le Col de Fourche, là où Mafate s'éveille face à moi, dans un décor magnifique, tout ce que je suis venu chercher pendant ce Trail. Je connais bien ce secteur de course pour l'avoir pratiqué cet été, je m'élance confiant sur cette jolie partie de parcours, qui ne presente pas de grosse difficulté. J'atteins Marla à 7h45, je prends le temps de sécher au soleil, de me ravitailler assis, un petit plat de pates/poulet vite avalé, et de recharger mes poches d'eau : la température va vite grimper maintenant. Delphine et les enfants vont bientôt attérrir. Cette jolie lumière et ces paysages grandioses reveillent tous mes sens, je suis vraiment très bien au km 44.

Prochaine étape à Roche Plate, je survole ce passage connu, tout en profitant de quelques pauses photo. Je me surprends à m'élancer sur les traversées de rivière sans appréhension. J' arrive à Roche Plate à 10h20, il fait chaud. On rejoint alors les coureurs du GRR, avec qui le parcours sera commun jusqu'à l'arrivée. Je reste une dizaine de minutes, je mange un peu et surtout je remplis de nouveau ma capacité totale de 2,5 litres d'eau. Les bénévoles nous ordonnent très justement de mouiller notre casquette, car le troisème « mur » se présente maintenant : 6,5 km d'ascension, avec 1000m de D+.

C'est la fournaise, le rythme est lent et les pauses à l'ombre se multiplient. J'atteins le Maïdo à 13h30, une foule de supporters est là pour encourager, une arrivée au sommet digne du Tour de France. Quel réconfort ! Surtout que de mon coté je retrouve mes amis réunionnais qui ont installé un camp de base 4 étoiles pour que je retrouve des forces. Quel bonheur de les voir tous là, Hélyette m'a accompagné en fin de montée, Jennyfer, caméra à la main donne des nouvelles à la métropole via FB, sa sœur est là avec son fils, Laurent me chauffe un plat de coquillettes, et Christian se prépare pour m'accompagner sur le tronçon suivant. Quelle équipe au top !

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Je reste une bonne ½ heure et profite de ce moment magique

Je poursuis mon aventure le ventre bien plein. Il fait chaud, le sol est poussiéreux, j'ai du mal à me mettre dans le rythme de la descente. Elle fait 13 km pour 1700m de D-, et paraissait assez longiligne sur le papier. Mais ne connaissant pas cette étape, je la trouve difficile, de part la fatigue et cette poussière dans les yeux et gênante pour la respiration. Christian m'encourage, il sait que la fin de descente est plus roulante, me voilà rassuré mais je serre les dents, les genoux commencent à être douloureux.

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3 heures de descente courageuse plus tard, me voilà à Sans Souci (quel nom quand même, quand je pense à mes genoux !). Ici se trouve le gros ravitaillement du Trail : je récupère un sac d'affaires propres, je file me doucher et me changer. Il ne faut pas être difficile sur l'hygiène, tous dans la même galère ! Un peu de pommade sur les tendons, quelques crêpes avalées, le plein d'eau, et c'est reparti dans une tenue toute propre. Hélyette m'accompagne pour les 2h suivantes, c'est sympa, on discute et on rigole, le moral revient, il fait moins chaud car la nuit tombe déjà. On s'amuse encore à traverser une rivière, je réussis à ne pas mettre les pieds dans l'eau, moi ;-)

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Au bout de 82 km de course, je retrouve une fin de parcours connue, la même qu'en 2014. Rien n'a changé...toujours autant de pierriers, de ravines, cours d'eau, d'échelles, parfois des mains courantes pour ne pas glisser...ça me rappelle la « Gilles Lalay Classic », une course d'enduro moto parmi les plus dures du monde, pour ceux qui se souviennent, avec le finish dans la fameuse « Côte du Corbeau Mort ». Un enfer, comme disaient les motards !

Je me trouve un peu dans ce contexte, après chaque étape, j'arrive au pointage en me disant « j'ai survécu ! »

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Je retrouve ici toute la famille au complet, les amis aussi

C'est génial ! J'ai même une chaise pour récupérer et me ravitailler...allez je monte à 5 étoiles ! Quel réconfort ! Je repars revigoré, les nouvelles sont bonnes, ils me trouvent plutôt en forme, je me sens bien c'est vrai. Et je les retrouve tous à 22h30 au pointage suivant, les enfants courent avec moi, super sympa cette ambiance. Jennyfer me donne des nouvelles de la métropole, d'où le soutien des amis est fort aussi.

Le plus difficile est derrière moi, je ne prends aucun risque, je sais que je peux aller au bout. J'avance sereinement, je n'oublie pas de boire encore et encore, et de m'alimenter. Je retrouve alors Christian à La Grande Chaloupe, qui va m'accompagner jusqu'à l'arrivée comme en 2014. Quel courage, quel gentillesse, il est pourtant 0h50, je me traîne... Je change une nouvelle fois les piles de la frontale, heureusement que j'avais prévu large ! La dernière grimpette se présente : 1200m de D+ sur 16 km. Le rythme est lent, je suis fatigué. Je ne veux pas dormir car je n'arriverais pas à me relever. Alors on marche, on fait quelques pauses. La nuit est belle, les étoiles merveilleuses.

Il est 4h du matin avant d'entamer la descente mythique du Colorado vers l'arrivée. Allez, la dernière...

Les coureurs se font rares, alors mon rythme est régulier, pas de prise de risque inutile. Il est 5h, St-Denis s'éveille, mais moi je vais aller me coucher ! Après 32h10 d'effort et deux nuits blanches, je suis heureux de franchir la ligne d'arrivée, fatigué mais sans trop de douleurs. L'objectif est atteint, la médaille est belle et je porte fièrement mon T-shirt « finisher ».

365e...un signe ? On remet ça dans 365 jours ?? Non...c'est beaucoup d'heures d'entraînement, beaucoup de sacrifices, j'aime La Réunion, j'aime mon sport, mais je garde raison...pour le moment...

 

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Un grand MERCI à tous pour votre soutien : ma famille, mes amis de métropole et de La Réunion. J'ai vécu cette aventure intense avec beaucoup de plaisir, et je me réjouis de tous vos messages reçus autour de cet événement

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